Montparnasse
Terrain agricole expérimental de culture maraîchère recouvrant un centre commercial
Centre commercial Montparnasse, Paris XIV

À l’occasion de la restructuration complète de l’îlot de la tour Montparnasse, ce projet consiste à recouvrir la toiture du centre commercial par une couche de terre suffisamment épaisse pour avoir les caractéristiques d’un terrain naturel. Il s’agit de transposer un terrain fertile de la campagne au cœur de la ville et de réinterroger la notion de culture hors-sol. Ce terrain est à la fois déconnecté de son territoire d’origine et préservé des pollutions de sol urbaines. Il est par principe hors-sol mais sa dimension et le paysage qu’il constitue lui donnent presque le statut d’un territoire.
La Ferme Montparnasse fonctionne sur le modèle de la cueillette et invite sa clientèle à venir se fournir directement à la source.
Au travers des cultures, des cheminements publics permettent la traversée du territoire agricole et assurent la connexion avec le centre commercial.
Par définition unique et non réplicable, la Ferme Montparnasse devient un lieu-dit. Elle rentre dans la lignée des terrains agricoles parisiens tels que les vignes de Montmartre et Belleville ou les cultures de la petite ceinture, de plus en plus répandues dans les friches urbaines.
La Ferme Montparnasse revendique le statut de terroir par son homogénéité. L’organisation en terrasse permet d’acheminer depuis différentes régions françaises des terres agricoles adaptées aux différentes variétés de fruits et légumes. Ce projet expérimental, tant d’un point de vue agricole que géographique, s’organise comme un gigantesque jeu combinatoire faisant varier, à partir de même variétés, les méthodes de culturel et, par là-même, les saveurs des récoltes. Aussi, bien qu’à vocation commerciale, la Ferme Montparnasse, par son système de cueillette, s’inspire des serres botaniques en reconstituant des parcelles de terre, « ambassades » agricoles des régions françaises. En plus de la dimension pédagogique habituelle, le Montparnasse est un lieu pensé comme un support de transmission de savoir plus vaste touchant aux notions de territoire et de patrimoine culturel. Ainsi, les consommateurs s’instruisent pendant leur cueillette.
La Ferme est envisagée comme un territoire naturel qui remodèle le relief autour de la tour Montparnasse sous forme d’une voûte imposante.
C’est aussi une retranscription de la colline de remblai sur laquelle, au XVIIe siècle, les étudiants venaient clamer des vers, la baptisant mont Parnasse en référence à l’une des résidences des neuf muses de l’Antiquité.
Une gigantesque voûte abrite l’extension du centre commercial redynamisé à des dimensions plus standard. Enfin, la forme de cette toiture traitée en terrasses est adaptée aux cultures maraîchères puisqu’elle partitionne les variétés et profite d’un système d’irrigation gravitaire.
La Ferme Montparnasse est un avatar de terrain agricole. Son succès certain auprès des citadins repose sur son caractère exceptionnel et un pouvoir d’attraction qui n’est pas totalement étranger à celui des parcs Disneyland. Cette dimension entertainment combinée au charme de la nature en ville est un amalgame entre l’utile et le récréatif et ne s’inscrit pas dans un engagement de politique agricole.
Aussi ce site pose la question des limites du divertissement à vertu pédagogique pour transmettre l’essence du monde agricole. Car si l’agriculture invente, elle doit avant tout produire en masse. C’est cette réalité qui semble la plus difficile à accepter par le consommateur citadin qui n’entend pas assimiler agriculture et industrie.
Par son attraction certaine, la Ferme Montparnasse montre la prégnance du fantasme du chasseur-cueilleur sur la réalité de l’agriculteur, le rêve d’une nature nourricière plutôt quedomptée, sollicitée, obligée.


